A la découverte d’un nouvel envahisseur : le crabe bleu

Tout commence à Port St Louis du Rhône début Août 2019 lorsque nous trouvons par hasard ce crabe dans 1m d’eau au bord d’une plage à l’embouchure du Rhône. Notre première impression est partagée entre émerveillement et curiosité. Nous ne connaissons pas du tout cette variété de crabe. Alors nous tentons de capturer celui-ci afin de pouvoir l’observer et effectuer des recherches. De quel spécimen s’agit-il ? Sa capture fut difficile, ce crabe est habile et agressif.

 

Grâce aux opercules situées sur ses pattes arrières, ce crabe se déplace très rapidement, il ne nage pas il « vole » dans l’eau ! Lorsqu’il fut cerné, il nous a été compliqué de le saisir, en effet,

 

sa carapace est une véritable armure ! Il est doté de deux grandes « aiguilles » latérales et détient un grand nombre de « dents » sur l’avant. Il n’a pas hésité à nous faire face, venant à notre encontre ses deux grandes pinces orientées vers le haut cherchant à nous saisir à maintes reprises.

une espèce appelée : « Crabe bleu»

Une fois capturée et nos recherches effectuées, nous apprenons qu’il s’agit d’une espèce appelée : « Crabe bleu » provenant des côtes Atlantique Ouest Américaines (du Canada jusqu’en Argentine). Le spécimen que nous avons capturé est une femelle (visible de par la coloration rouge de ses pinces) ; elle était pleine d’oeufs. Il est aussi apparu que le Parc Naturel Marin du Golfe de Lion étudie avec attention ce nouvel « envahisseur » et a communiqué un signal d’Alerte dans un article de Presse.

 

(https://www.midilibre.fr/2018/11/26/aude-et-p-o-le-crabe-bleu-nouvel-envahisseur-du-littoral,4982502.php)

 
 Nous nous mettons donc en relation avec le Parc Naturel Marin du Golfe du Lion et échangeons avec Mr Thierry Auga-Bascou. Celui-ci n’est pas surpris de notre découverte et nous fait part de son étude sur le sujet depuis 2017. En effet, ce crabe déjà visible à Port Leucate est particulièrement invasif, et son impact sur le milieu Marin peut être très important. Il nous est conseillé de ne pas relâcher notre spécimen (car pleine) et si nous le souhaitons, de goûter les prochains que nous pourrions capturer ; leur chair est très bonne, notamment celle des mâles.
 
  

Ce crabe est déjà présent sur les côtes espagnoles et en Tunisie dans le Golfe de GABES depuis 2015 ou les pêcheurs ont surnommé ce redoutable prédateur marin “Daech”, en référence à l’acronyme arabe du groupe Etat islamique. Ce crabe a rapidement proliféré, ayant trouvé sur ce littoral un environnement favorable et une nourriture abondante – seiches, crevettes ou poissons fins. La voracité de cette espèce invasive a exacerbé les difficultés économiques de bien des pêcheurs. Ces crabes, qui étaient vu comme une ressource supplémentaire au début par les pêcheurs, sont rapidement devenus une « malédiction ». Ils dévorent les bons poissons, daurades, loups, rougets et cisaillent les filets. De plus, le Crabe Bleu est très robuste et a la faculté de s’adapter à plusieurs types d’environnements marins : eau salée, saumâtre ou eau douce, rien ne le dérange. Nous avons conservé vivant une femelle pendant 8 jours à l’air libre sans que celle-ci ne présente aucun signe de faiblesse. De plus, ces crabes se mutilent entre eux, une des femelles capturée par la suite avait tué deux mâles présents dans leur caisse, en leur coupant leurs pinces et leurs pattes.

transmettre ces éléments aux personnes en charge d’étudier ce crabe

Alertés par ces faits alarmants, nous décidons d’apporter notre soutien aux recherches établies par les Techniciens de l’environnement. Nous échangeons avec un grand nombre de nos pêcheurs locaux sur les conséquences futures sur notre écosystème si cette espèce venait à proliférer et prospérer ici. Ceux-ci n’hésitent pas à coopérer avec nous et nous permettent de récolter plus d’informations, comme l’évolution du nombre de captures ainsi que leurs géolocalisations. Le but étant de transmettre ces éléments aux personnes en charge d’étudier ce crabe.

 

Nous tenons à remercier tout particulièrement Mr Grach Morgan, Mr Campani Christopher et Amarouche Khaled ainsi que Mr Manias Yves pour leur précieuse aide

Voici un spécimen mâle (pinces bleus) : au deuxième plan sur la photo de gauche et au premier plan sur la photo de droite.

La Femelle (pinces rouge) est généralement moins grosse. Mais reste le spécimen le plus AGRESSIF !

 

De cette aide, nous observons une hausse du nombre de captures recensées puisque nous comptabilisions quelques prises pour le mois de Septembre (2 à 3 crabes par filet) contre une plus grande quantité en Octobre (une quinzaine par filet). De plus, nous notons la présence abondante de ces Crabes Bleus dans des eaux peu profondes (2 à 3 mètres) ainsi qu’une répartition de plus en plus étendue sur notre littoral. Nous observons aujourd’hui cette espèce de crabe partout chez nous. De la plage de Piemenson, en passant par l’embouchure du Rhône, le long de la plage Napoléon jusqu’à la pointe de la Gracieuse et dans le golfe de Carteau.

 

A la demande de Mr Thierry Pastor, scientifique à l’université de Montpellier, nous avons conservé quelques spécimens, Mâles et Femelles, que nous avons transmis à Mademoiselle Célia Grillas Technicienne de l’environnement au Parc Naturel Régional de Camargue. Ils seront analysés et un retour nous sera communiqué.

Melle Grillas Célia Parc Naturel Régional de Camargue
Melle Grillas Célia du Parc Naturel Régional de Camargue et Mr Cavolino. Gaël, Président du Port St Louis Fishing Club

RI: Crabe bleu – Biologie – Pascal Romans

Le crabe bleu en région Occitanie :

Caractéristiques biologiques et comparaison

avec l’espèce présente en Tunisie

Pascal Romans

Responsable Service d’aquariologie et Conservateur du Biodiversarium

Observatoire Océanologique de Banyuls sur Mer

Sorbonne-Université / CNRS

Le crabe bleu américain

Callinectes sapidus

Une espèce semblable mais pourtant lointaine du Crabe bleu lessepssien

Portunus segnis

 
 

Caractéristiques biologiques de Callinectes sapidus et Portunus segnis

-Aires de répartition d’origine :

Callinectes sapidus (C. S) : Côtes atlantiques américaines du Canada à l’Argentine ;

Portunus segnis (P. S) : Indo-Pacifique – Mer Rouge

-Répartition actuelle :

C.S : Méditerranée (Espagne, France dont Corse, Italie), Manche, Atlantique, Caraïbes,

Japon (?), Afrique de l’Est (?) ;

Le premier signalement en France métropolitaine date de 1901 (côte Atlantique) puis

Etang de Berre en 1962 ; Manche (années 90)… Delta de l’Ebre (Espagne 2013), 80T en

2019, etc

Signalée depuis 2018 en Tunisie (Nord) et au Maroc (lagunes)

P.S : Méditerranée Orientale principalement. Présente en masse en Tunisie depuis 2014.

Connue en Méditerranée Orientale depuis les années 1900.

-Milieux de vie dans l’aire de répartition d’origine :

C. S : fonds vaseux ou sableux, principalement dans les lagunes et les estuaires, jusqu’à 35m

de profondeur ;

P.S : Tous types de milieux, en mer. Observé dans le cadre de la mission sur des fonds

d’herbiers, des fonds sableux, vaseux et rocheux.

-Tolérance à la température :

C.S : 3 à 35°C ; tolérance aux faibles teneurs en 02

Inactif en dessous de 10°C – Longévité 3 à 4 ans

PS : Inactif en dessous de 14°C – Longévité 3 à 4 ans

-Tolérance à la salinité :

C. S : 2 à 48 g/l

P.S : ? Semble moins tolérant aux variations de salinité

-Longueur maximale (carapace) : 23 cm pour un poids pouvant atteindre 800 g.

-Capacités de déplacement évaluées à 15km/jour (nage)

-Régime alimentaire :

Très agressifs y compris entre eux !!!

-Omnivores (y compris amphibiens, insectes), nécrophage, parfois cannibale, dont 40%

de gastéropodes et bivalves. 20% de juvéniles de poissons. Cesse de s’alimenter en

dessous de 15°C. Impact sur les juvéniles d’huîtres ?

-Prédateurs potentiels ? Poulpe, seiche, congres ? Anguilles pour les juvéniles ? Oiseaux

?

-Maturité sexuelle et reproduction au niveau de la zone d’origine :

C. S : 12 à 18 mois

P. S : 5 à 6 mois

-Chaque femelle peut produire plus de 2 millions d’oeufs.

 

Ponte estivale. Durée de vie larvaire : 30 à 40 jours.

 

Des indices de reproduction en août 2019 dans le petit Rhône (femelles grainées) pour

C.S.

Portunus segnis en train de consommer un Murex…

-Capacités de déplacement évaluées à 15km/jour (nage)

-Régime alimentaire :

Très agressifs y compris entre eux !!!

-Omnivores (y compris amphibiens, insectes), nécrophage, parfois cannibale, dont 40%

de gastéropodes et bivalves. 20% de juvéniles de poissons. Cesse de s’alimenter en

dessous de 15°C. Impact sur les juvéniles d’huîtres ?

-Prédateurs potentiels ? Poulpe, seiche, congres ? Anguilles pour les juvéniles ? Oiseaux ?

-Maturité sexuelle et reproduction au niveau de la zone d’origine :

C. S : 12 à 18 mois

P. S : 5 à 6 mois

-Chaque femelle peut produire plus de 2 millions d’oeufs.

Ponte estivale. Durée de vie larvaire : 30 à 40 jours.

Des indices de reproduction en août 2019 dans le petit Rhône (femelles grainées) pour

C.S.

De nombreuses interrogations et questions en vue de la mise en

place de mesures de gestion…

-Quelle a été la dynamique de colonisation de l’espèce «soeur » en Tunisie ?

-Que sait-on du cycle biologique des 2 espèces dans les eaux méditerranéennes ?

-Comment repérer des juvéniles et évaluer leurs densités ?

-Quel est l’impact des juvéniles mais aussi des stades larvaires sur les espèces autochtones ?

-Quelle est la période de reproduction en Méditerranée ?

-Quels sont les prédateurs de l’espèce ?

-Quelles sont les proies des adultes et des juvéniles ?

-Quelle est la dynamique de la population durant l’hiver ?

-Quel est le taux de croissance et la taille de première maturité sexuelle ?

-Pathogènes associés transmissibles ?…

-Déplacements des adultes (marquages ?) – D’où viennent les crabes capturés aujourd’hui ?

Les 2 espèces présentent un fort intérêt commercial

Merci…

 

– GAL/GALPA Pays Pyrénées Méditerranée

– GAL/GALPA Est-Audois

– GAL/GALPA Vidourle Camargue

– Région Occitanie

– CIHEAM-IAMM

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